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Société de Biomécanique
Les pionniers

 Weibel 01 

60 ans de recherche consacrés à l’édification d’une physiologie respiratoire moderne 

Préambule: Le Professeur Ewald Weibel a joué un rôle déterminant dans la compréhension actuelle de l'appareil respiratoire. Ses domaines de recherche sont la physiologie du système respiratoire, la morphométrie, la relation structure-fonction du poumon, la physiologie et l’anatomie comparées, la biologie cellulaire, la microscopie électronique. Les faits historiques sont extraits d’un chapitre d’ouvrage écrit par Ewald Weibel (1).

Au printemps 1966, Ewald Weibel, alors âgé de 37 ans, s’installe en Suisse pour prendre en charge la chaire du département d’anatomie de l’Université de Berne. Il y découvre une impressionnante collection de squelettes d’oiseaux et de mammifères de toutes tailles, ainsi qu’une vitrine où sont exposés d’anciens moulages d’arbres bronchiques réalisés par son prédécesseur Christoph Theodor Aeby, auteur en 1880 d’un premier traité en allemand sur l'arbre bronchique des mammifères et de l'homme (2)traité qui lui avait servi de base pour publier en 1963 un ouvrage fondateur de la Physiologie Respiratoire moderne intitulé : « Morphometry of the Human Lung » (3).

Dans ses travaux fondateurs sur la structure pulmonaire, Ewald Weibel a poursuivi deux objectifs majeurs : (i) décrire finement la structure de l’échangeur gazeux que constitue le poumon profond, et (ii) élaborer des représentations modèles de l’arbre aérien qui conduit l’air vers les zones d’échanges. À la différence des approches antérieures, essentiellement qualitatives, la démarche d’Ewald Weibel a été quantitative, apportant pour la première fois une représentation précise de l’architecture pulmonaire fondée sur des données morphométriques. Elle lui a permis de réaliser à partir de 1959 les premières mesures systématiques de la morphométrie complète de l’arbre aérien sur des bases théoriques fiables (4).

Les recherches sur la physiologie de la respiration avaient connu une avancée notable aux Etats-Unis dès 1940, à l’Hôpital Bellevue dans la ville de New York, à l’instigation d’André Cournand (médecin et physiologiste français, naturalisé américain en 1941) et de Dickinson W. Richards, tous deux lauréats du prix Nobel de Physiologie ou Médecine en 1956 pour leur travail sur le cathétérisme cardiaque. Les progrès permis par cette découverte ont engendré des études – conduites en collaboration avec Richard L. Riley – qui se sont révélées fondamentales pour comprendre la « relation perfusion/ventilation alvéolaire » et son rôle essentiel dans les échanges gazeux pulmonaires. Ce résultat a véritablement révolutionné la physiologie respiratoire, rendant possible l’estimation du débit cardiaque par la méthode de Fick, ainsi que la mesure des pressions artérielles pulmonaires chez les sujets normaux et les patients. C’est cette équipe prestigieuse, qui nourrissait un intérêt tout particulier pour les études de la relation entre structure et fonction, que le jeune anatomiste Ewald Weibel rejoint dès 1959 à la suite de la proposition d’André Cournand « d’étudier quoi que ce soit sur la structure du poumon qui intéresserait la physiologie ». L’approche structurale et morphologique restait à cette époque peu explorée pour le système respiratoire, et l’on ne savait pas précisément quel angle d’attaque serait le plus profitable pour faire avancer les connaissances en physiologie respiratoire.

La rencontre à New York d’une troisième personnalité hors du commun, Domingo M. Gomez, va jouer un rôle essentiel dans la démarche d’Ewald Weibel. D’origine Cubaine, Domingo Gomez a étudié la médecine à Paris grâce au soutien d’un éminent chercheur français en sciences médicales venu visiter Cuba, Henri Vasquez. En parallèle, il est également devenu un mathématicien talentueux. Fuyant le nazisme puis le castrisme, il s’installe finalement à New York où il trouve dans la démarche d’Ewald Weibel – qui vise une approche quantitative de la structure pulmonaire normale et pathologique – la possibilité de mettre en application ses connaissances mathématiques.

Conscients tous deux que la compréhension des phénomènes physiologiques doit passer par une analyse mathématique précise, ils élaborent une méthodologie théorique sophistiquée afin de décrire la structure pulmonaire. Ewald Weibel était tout prêt à assumer l’incompréhension que cette démarche pourrait susciter car c’était selon lui le prix à payer pour être en accord avec lui-même. Cependant, pour caractériser la relation entre la morphométrie pulmonaire et les échanges gazeux, il leur fallait collecter des données quantitatives sur la géométrie acinaire. C’est ce à quoi Ewald Weibel s’est attaché, en n’hésitant pas à importer des méthodes stéréologiques fiables issues des sciences des matériaux sous l’impulsion notamment de mathématiciens allemands, afin de les adapter au contexte biologique et en particulier à celui du poumon.

L’une des questions posées consistait notamment à déduire les paramètres d’une structure tridimensionnelle à partir de coupes bidimensionnelles (sections) de cette même structure étudiées au microscope. Or la résolution de ce problème nécessite d’intégrer des notions statistiques et probabilistes héritières d’une longue histoire. Les premières approches théoriques de cette question remontent en effet à 1777, lorsque Georges-Louis Leclerc, comte de Buffon (1707-1788), résolut un problème célèbre en calculant la probabilité qu’une aiguille de longueur L jetée au hasard rencontre un réseau de lignes parallèles séparées d’une distance D(cette probabilité vaut en fait (L/D)×(2/p), ce qui permet donc une détermination expérimentale probabiliste du nombre p !). 

Se fondant sur des méthodes analogues, le nombre d’alvéoles pulmonaires a pu être évalué à partir du comptage des contours alvéolaires dans un échantillon de coupes histologiques, puis validé sur des modèles physiques composites. Le nombre ainsi obtenu par la méthode de Weibel et Gomez (5) est d’environ 300 millions pour un poumon humain adulte. Cette estimation repose néanmoins sur certaines hypothèses, notamment sur des distributions de taille et de volume des alvéoles faisant intervenir le facteur de forme qui relie le volume à la surface alvéolaire. En exploitant de nouvelles méthodes stéréologiques non soumis à ces limitations, cette estimation a été par la suite améliorée pour être portée à 400 millions  (6).

Pour décrire le caractère exceptionnel de l’échangeur gazeux pulmonaire et appréhender l’apport déterminant d’Ewald Weibel dans la connaissance de ce système, il faut prendre conscience de la complexité du système respiratoire. Le travail de Weibel et Gomez a permis d’obtenir, par des méthodes stéréologiques (7), des données fondamentales sur la structure de l’échangeur pulmonaire : non seulement les surfaces alvéolaire et capillaire, mais aussi le volume des capillaires ainsi que l’épaisseur de la membrane qui sépare l’air et le sang (4). Ainsi la surface alvéolaire, d’abord mesurée par microscopie optique, a été évaluée à 75 m2 puis, par microscopie électronique, à 130 m2. Cette forte influence de la résolution de l’appareil sur la mesure géométrique est caractéristique de la structure « fractale » du poumon, notion que nous allons retrouver plus loin (8). Sur la moitié de la surface alvéolaire, l’épaisseur de cette paroi ne dépasse 0,5 µm tandis que l’épaisseur fonctionnelle, qui correspond à sa moyenne harmonique, est estimée à 1 µm. L’échangeur air-sang est constitué quant à lui par les parois inter-alvéolaires (septa), ces dernières étant elles-mêmes parcourues par un réseau dense de capillaires sanguins. Sachant que les meilleurs microscopes optiques ont une résolution supérieure à 0,2 µm, il a fallu attendre l’invention du microscope électronique (1939), puis ses applications aux tissus biologiques dans les années 1950-1952 (rendue possible par l’introduction de molécules de métaux lourds dans les tissus) pour acquérir des données sur la structure fine de cet échangeur. C’est ainsi que l’existence d’une paroi alvéolaire continue, composée de cellules épithéliales (à noyau) à la morphologie très particulière (notamment un cytoplasme très aplati constituant l’un des caractères spécifiques de la barrière alvéolo-capillaire), a pu être démontrée chez tous les mammifères, homme inclus, mettant un terme à un long débat sur la nature cellulaire ou acellulaire de cette paroi alvéolaire (9).

Kurt von Neergaard (10) avait été le premier à considérer le rôle critique joué par la tension de surface au niveau alvéolaire, en raison de la structure très particulière de la région acinaire (7). La découverte, dans les années 1960, du surfactant et de son rôle comme élément stabilisateur de la surface alvéolaire a eu un impact considérable dans le domaine de la physiologie respiratoire. En 1967, Ewald Weibel et Joan Gil ont mis en évidence pour la première fois, par microscopie électronique et sur des poumons de rat fixés par perfusion vasculaire, la présence d’un système de double couche au niveau de la surface alvéolaire : une couche aqueuse (siège des macrophages alvéolaires) surmontée d’un film phospholipidique, le surfactant (11). Les travaux d’Ewald Weibel, réalisés avec Hans Bachofen (12), ont par la suite montré que la surface alvéolaire était stabilisée grâce à l’équilibre mécanique entre la structure du tissu pulmonaire, la pression de distension capillaire et la tension de surface régulée par le surfactant.

Sur la base de ces données morphométriques, la capacité de diffusion d’un poumon humain a ainsi pu être estimée théoriquement à 200 ml O2×min-1×mmHg-1, une valeur 10 fois supérieure à celle mesurée au repos (13). L’explication la plus vraisemblable pour un tel écart était l’existence d’une réserve respiratoire importante qui n’est mobilisée que dans les conditions extrêmes comme l’exercice musculaire (14) ou l’hypoxie d’altitude (15). Les travaux ultérieurs d’Ewald Weibel, en collaboration avec des équipes françaises, ont de fait démontré que les dimensions géométriques de l’acinus autorise l’existence d’une réserve qui se caractérise au repos par une moindre absorption de l’oxygène par la paroi des dernières bronches (16).

Mais les études morphométriques de Weibel ne se sont pas limitées à la partie acinaire ; elles ont porté également sur l’arbre trachéobronchique. Avant les travaux fondateurs de Weibel et Gomez, les données quantitatives sur l’architecture et les dimensions de l’arbre trachéobronchique étaient très rares. Un précurseur prestigieux s’était pourtant déjà penché sur la question : Léonard de Vinci (1510), qui avait dessiné de magnifiques modèles d’arbres bronchiques et vasculaires et même élaboré l’ébauche d’une théorie sur les effets de la structure sur l’écoulement dans le poumon (17). Mais dans la littérature scientifique moderne, Weibel et Gomez ne trouvèrent que deux études traitant du sujet, publiées respectivement en 1871 et 1915 par Christoph Theodor Aeby (né en 1835) et Fritz Rohrer (né en 1888). Par un clin d’œil du destin, tous deux étaient originaires de Berne, ville où Ewald Weibel allait être nommé titulaire de la chaire d’anatomie un siècle après qu’Aeby ait occupé la même position, et 50 ans après que Rohrer y avait été privatdocent en physiologie. Par ailleurs, les deux études, séparées de plus de 30 années, étaient très différentes en termes de perspectives et de méthodes. 

L’approche scientifique d’Aeby pour décrire le poumon du mammifère, qui a fortement inspiré Weibel par la suite, était nettement tournée vers l’anatomie comparée, à une époque où anatomie et physiologie étaient des sciences clairement distinctes, tandis que les travaux de Rohrer se concentraient sur le poumon humain dans une perspective physique estimant la résistance aérodynamique dans un arbre aux branchements dichotomiques. L’approche d’Aeby, à l’instar de celle de Weibel, était quantitative et axée sur la recherche d’un principe général de construction. Mais si l’on examine en détail la loi précise qui gouverne la génération des branches, on s’aperçoit de la grande différence qui existe entre Aeby et Weibel. Le premier, inspiré par l’arborescence végétale, concevait l’arbre bronchique de façon monopodiale : un tronc unique d’où partent des branches adjacentes. Cette conception l’a conduit à simplifier exagérément la réalité anatomo-physiologique comme il l’a reconnu plus tard. À l’inverse, la vision dichotomique (un arbre qui se divise en deux à chaque branche, inspiré des travaux de Léonard de Vinci), assortie ou non de quelques irrégularités, est apparue, grâce aux travaux d’Ewald Weibel, comme la plus pertinente. Elle est surtout en accord avec les processus de branchement successif des tubes bronchiques par dichotomie au cours du développement pulmonaire, résultats de travaux amorcés par les embryologistes dont Kölliker fut un pionner (1861).

Quant à l’approche de l’arbre bronchique développée par Fritz Rohrer, elle fut la première réellement fondée sur une question physiologique. Dès sa thèse publiée en 1915, ce médecin-chercheur s’est intéressé à la résistance des voies aériennes, à son origine physique, cherchant à mettre en évidence les paramètres morphométriques pertinents et l’effet des irrégularités d’embranchement de l’arbre bronchique sur la respiration dans les différentes régions pulmonaires. Optant pour une dichotomie irrégulière, comme Weibel et Gomez quelques 50 ans plus tard, il proposa pour décrire la relation pression-débit dans l’ensemble de l’arbre aérien (dont la pente représente la résistance aérodynamique) une formule très générale de type parabolique qui intègre les propriétés physiques du gaz respiré et les effets non linéaires associés aux changements de régime de l’écoulement (laminaire ® turbulent) (7). La nature de cette relation a été âprement discutée dans la littérature et des modèles aérodynamiques (développement de couche limite à chaque embranchement) ont été ultérieurement proposés (18, 19). Initiateur d’une approche fondamentale, Rohrer a également cherché à intégrer l’élasticité pulmonaire dans sa modélisation. 

Ainsi, les travaux d’Ewald Weibel sur la physique de l’arbre aérien se situent à l’évidence dans le prolongement de l’œuvre de Rohrer. Le calcul des vitesses tout au long de l’arbre a permis de valider les hypothèses de Gomez, à savoir qu’à partir d’un certain niveau critique de l’arbre (environ la 16ème génération en partant de la trachée), les vitesses d’écoulement du gaz sont si basses que le transport par diffusion domine (20). De cette observation et d’autres conclusions issues des mesures morphométriques découle la partition des voies aériennes en 3 zones proposée par Ewald Weibel, un concept qui fait toujours autorité en physiologie respiratoire : zones de conduction, de transition, et respiratoire (3).

Quant à l’architecture de l’arbre aérien, nous avons vu que l’analyse systématique de la géométrie par Ewald Weibel a démontré le caractère dichotomique de l’arbre bronchique humain. Ce caractère se retrouve également dans les zones périphériques des poumons de la plupart des animaux, différant en cela nettement de la vision d’Aeby. Un décompte précis du nombre total de canaux alvéolaires dans 5 poumons humains a permis à Ewald Weibel de déterminer une gamme, 12-16.106, à partir de laquelle a pu être estimé un nombre total de générations dichotomiques : 23 en moyenne (4). L’évolution des diamètres et longueurs en fonction de la  génération, estimée sur un moulage en plastique de l’arbre aérien comportant plus de 1000 bronches, a abouti à plusieurs découvertes : l’irrégularité de la dichotomie des voies aériennes, le rapport longueur/diamètre quasi constant à chaque génération, la distribution des longueurs et diamètre à travers les générations. Finalement, deux modèles ont été proposés pour synthétiser ces découvertes : un modèle dit « A », à dichotomie régulière et un modèle dit « B », à dichotomie irrégulière (3, 4). Le modèle « A » est ainsi devenu une référence très largement employée pour représenter les voies aériennes tandis que le modèle « B », plus réaliste, a été paradoxalement moins utilisé.

Une loi très générale a par ailleurs été mise en évidence, permettant de décrire l’évolution du diamètre à chaque génération « » dans les voies aériennes conductrices. Elle énonce que le rapport entre diamètres de bronches appartenant à des générations consécutives est quasi constant : Dn+1/Dn ≈ 2-1/3≈ 0,79  (4) ce qui correspond à la loi de Hess-Murray initialement formulée dans des travaux portant sur le système artériel (21 , 22). Cette loi traduit en fait le caractère « auto-similaire » de l’arbre trachéobronchique (23, 24). En revanche, dans la zone de transition et la zone respiratoire, l’évolution du diamètre à chaque génération est bien plus faible. Ces mêmes travaux morphométriques ont enfin démontré l’augmentation considérable (géométrique) de la section cumulée le long de l’arbre, la dite section atteignant 1 m2 au niveau des canaux alvéolaires périphériques. 

Le modèle de l’arbre trachéobronchique élaboré par Ewald Weibel a ainsi établi un lien fort entre l’anatomie pulmonaire et la géométrie dite « fractale », cette géométrie inventée par le mathématicien Benoît Mandelbrot pour décrire les objets « invariants d’échelle » (auto-similaires) qui reproduisent indéfiniment leur structure à l’intérieur d’eux-mêmes à des échelles toujours plus petites. Mandelbrot a ainsi proposé des arbres fractals (1977) capables de remplir un espace de façon homogène par une structure générique en « T » ou « Y », en conservant des branches de rapport d’aspect, autrement dit de rapport longueur/diamètre constant (25). Or l’analogie entre le modèle fractal et l’arbre respiratoire tel que mesuré par Weibel et Gomez est frappante. En effet, en dépit de grandes variations de dimensions, l’arbre aérien mesuré présente un rapport longueur/diamètre à peu près constant (L/D=3,25), ainsi qu’un rapport entre diamètres successifs à chaque embranchement d’environ 0,85 dans l’arbre trachéobronchique intermédiaire (3). Par ailleurs, ces relations s’étendent au-delà de l’espèce humaine, les variations observées de ces grandeurs géométriques entre espèces étant dues à la nécessité d’atteindre tous les points d’un l’espace à remplir dont la forme peut varier (26). Le caractère quasi-fractal de l’arbre aérien et des arbres vasculaires attenants est un exemple remarquable de structure biologique dont la géométrie est optimisée pour répondre au mieux à leur finalité physiologique (8).

D’autres auteurs ont proposé des modèles différents pour décrire l’arbre trachéobronchique. Ainsi, dans celui développé par Keith Horsfield (1968), le décompte des générations s’effectue à partir du bas de l’arbre, à l’inverse de l’arbre de Weibel (ou de Mandelbrot) dont la numérotation des générations part de la trachée. Ces deux modèles sont très différents conceptuellement. Si le premier facilite la prise en compte des asymétries, il aboutit cependant à dénombrer 25 générations dans les voies aériennes humaines (23) ce qui n’est finalement pas si différent des 23 générations dénombrées par Ewald Weibel. Quant aux rapports d’embranchement obtenus avec les deux modèles, ils sont très proches, ce qui signifie que les deux modèles sont largement compatibles malgré les différences d’approche. 

La description quantitative de l’arbre trachéobronchique introduite par Ewald Weibel a joué un rôle primordial dans la modélisation pulmonaire. Non seulement elle a servi de fondation à l’élaboration de modèles informatiques, mais elle a permis pour la première fois d’effectuer des calculs simples et puissants pour évaluer les propriétés de transport de cette structure. Un travail réalisé en collaboration étroite avec Ewald Weibel a ainsi démontré que les lois d’échelle de l’arbre de conduction sont très proches de à celle d’un réseau de transport offrant le meilleur compromis entre perte d’énergie par friction et occupation volumique (24).  Néanmoins, cette optimalité géométrique découlant de la nature quasi fractale de l’arbre bronchique doit également incorporer des critères de « robustesse », car de petites variations géométriques risquent d’induire de fortes variations des performances respiratoires. Ainsi, la géométrie pulmonaire moyenne offre bien une efficacité physique optimale mais tout en respectant une « marge de sécurité » qui empêche de rentrer dans la zone critique de fonctionnement.

Sur tous ces aspects, l’apport d’Ewald Weibel a été et reste déterminant. Il n’a pas simplement « décrit » le poumon, il a offert à la communauté scientifique un langage, en quelque sorte le vocabulaire et la grammaire du poumon qui permettent de la visualiser simplement, de le penser, de le manipuler. À charge pour les générations futures de poursuivre l’œuvre d’Ewald Weibel dans un domaine emblématique pour le biomécanicien : la physiologie respiratoire, dont les immenses applications intéressent tant la biologie moderne que la médecine et la clinique de demain.

 

https://de.wikipedia.org/wiki/Ewald_Weibel

 

1994 –Present: Emeritus Professor of Anatomy, University of Berne, Switzerland

 1981 - 2002 Associate in the Museum of Comparative Zoology, Harvard University, Cambridge, MA., USA

 1979 + 1981: Agassiz Visiting Professor in Comparative Biology, Harvard University, USA

 1984 - 1985: Rector University of Berne

 1974 Visiting Professor, Yale University, USA

 1966 – 1994: Professor and Chairman, Institute of Anatomy, University of Berne

 1963 - 1966: Assistant Professor of Anatomy, University of Zürich, Switzerland

 1961 - 1962 Research Associate, Rockefeller University, New York, USA, Dept. of Cell Biology (Prof. George E. Palade)

 1959 – 1961 Research Associate, Cardiopulmonary Laboratory, Bellevue Hospital, College of Physicians and Surgeons, Columbia University, USA (Profs. Andre F. Cournand and Dickinson W. Richards)

 1958 - 1959: Research Fellow, Yale University (Prof. Averill A. Liebow), USA

 1955 - 1958: Assistant in Anatomy, University of Zürich, (Prof. Gian Töndury), Switzerland

 1949 - 1955 Medical School in Zürich, Göttingen and Paris, graduated 1955 Zürich, Switzerland 

 1929 Year of birth

 

Honours and Awards 

  • Marcel-Benoist Prize (Swiss Federal Government ) (1974)
  • Honorary Fellow of the Royal Microscopical Society (1979)
  • Felix Fleischner Medal (1979)
  • Foreign Associate of the U.S. National Academy of Sciences (1981)
  • College Medalist, American College of Chest Physicians (1982)
  • Fellow, American Association for the Advancement of Science (1985)
  • Anders Retzius Medal, Karolinska Institutet, Stockholm (1987)
  • Member of Royal Society of Sciences of Uppsala (1987)
  • R. Schinz Medal, (1988)
  • Honorary Degree of Doctor of Science, University of Edinburgh (1988)
  • Member of the Polska Akademia Nauk (1988)
  • Member Deutsche Akademie der Naturforscher Leopoldina (1989)
  • Medal of Royal Microscopical Society (1989)
  • Member Swiss Academy of Medical Sciences (1992),
  • Jan Evangelista Purkinje Gold Medal, Prague (1993)
  • Member Academia Europaea (1998)
  • Honorary Doctor of Medicine, University of Geneva (1999)
  • Honorary Foreign Member, American Academy of Arts and Sciences (2000)
  • Honorary Member, Swiss Academy of Sciences (2000)
  • Honorary Member, Swiss Academy of Medical Sciences (2004)
  • Prix “La Recherche”, Paris (2005)
  • Educational Award, European Respiratory Society (2007)
  • Honorary Member in Professional Societies: Societé Française de Microscopie Electronique, International *Society for Stereology, American Physiological Society, Swiss Society of Radiology and Nuclear *Medicine, Swiss Society for Anatomy, Histology and Embryology.

 

 

Auteurs : Daniel Isabey* (DR émérite CNRS, Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.), Bruno Louis* (CR Inserm, Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.) et Marcel Filoche* & (DR CNRS, Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.), 

*Equipe Biomécanique & Appareil Respiratoire, ERL7240, Inserm U955, IMRB Créteil et &Physique de la Matière Condensée, Ecole Polytechnique, Université Paris-Saclay, Palaiseau.

 

 

Illustrations

Weibel 02 

Figure : (gauche) vue en coupe d’un acinus humain, réalisée en microscopie électronique par Ewald Weibel ; (centre) zoom sur un conduit acinaire entouré d’alvéoles ; (droite) zoom sur un septum séparant deux alvéoles. On aperçoit les globules rouges dans les capillaires qui serpentent entre les deux minces parois alvéolo-capillaires.

 

Références

 

1.         E. R. Weibel, in Respiratory Physiology People and Ideas, W. J.B., Ed. (Springer, New York, 1996).

2.         C. T. Aeby. (Engelmann, Leipzig, 1880).

3.         E. R. Weibel, Morphometry of the Human Lung. A. P. Springer-Verlag, Ed.,  (Academic Press, Berlin, New York, 1963).

4.         E. R. Weibel, D. M. Gomez, Architecture of the human lung. Use of quantitative methods establishes fundamental relations between size and number of lung structures. Science 137, 577-585 (1962).

5.         E. R. Weibel, D. M. Gomez, A principle for counting tissue structures on random sections. J Appl Physiol 17, 343-348 (1962).

6.         M. Ochs et al., The number of alveoli in the human lung. Am J Respir Crit Care Med 169, 120-124 (2004).

7.         F. Rohrer, Der Strömungswiderstand in den menschichen atemwegen und der einfluss der unregelmässigen verzweigung des bronchialsystems auf den atmungsverlauf in verschiedenen lungenbezirken Arch. Gesamte Physiol. 162, 225-299 (1915).

8.         E. Weibel, in Fractals in Biology and Medecine, T. Nonnenmacher, G. A. Losa, E. R. Weibel, Eds. (Birkhäuser, Basel, 1994).

9.         F. N. Low, The pulmonary alveolar epithelium of laboratory mammals and man. Anat Rec 117, 241-263 (1953).

10.       K. V. Neergaard, Neue Auffassungen über einen Grundbegriff der Atemmechanik. Die Retraktionskraft der Lunge, abhängig von der Oberflächenspannung der Alveole. Z. Gesamte Exp. Med. 66, 1-22 (1929).

11.       E. R. Weibel, J. Gil, Electron microscopic demonstration of an extracellular duplex lining layer of alveoli. Respir Physiol 4, 42-57 (1968).

12.       H. Bachofen, P. Gehr, E. R. Weibel, Alterations of mechanical properties and morphology in excised rabbit lungs rinsed with a detergent. J Appl Physiol Respir Environ Exerc Physiol 47, 1002-1010 (1979).

13.       P. Gehr, M. Bachofen, E. R. Weibel, The normal human lung: ultrastructure and morphometric estimation of diffusion capacity. Respir Physiol 32, 121-140 (1978).

14.       J. A. Dempsey, P. G. Hanson, K. S. Henderson, Exercise-induced arterial hypoxaemia in healthy human subjects at sea level. J Physiol 355, 161-175 (1984).

15.       P. D. Wagner et al., Pulmonary gas exchange in humans exercising at sea level and simulated altitude. J Appl Physiol (1985) 61, 260-270 (1986).

16.       B. Sapoval, M. Filoche, E. R. Weibel, Smaller is better--but not too small: a physical scale for the design of the mammalian pulmonary acinus. Proc Natl Acad Sci U S A 99, 10411-10416 (2002).

17.       C. D. O'Malley, J. B. d. C. M. Saunders, leonardo da Vinci on the human body (H. Schuman, New York, 1952).

18.       D. Isabey, H. K. Chang, Steady and unsteady pressure-flow relationships in central airways. J Appl Physiol Respir Environ Exerc Physiol 51, 1338-1348 (1981).

19.       D. Isabey, H. K. Chang, C. Delpuech, A. Harf, C. Hatzfeld, Dependence of central airway resistance on frequency and tidal volume: a model study. J Appl Physiol (1985) 61, 113-126 (1986).

20.       D. M. Gomez, A Physico-Mathematical Study of Lung Function in Normal Subjects and in Patients with Obstructive Pulmonary Diseases. Med Thorac 22, 275-294 (1965).

21.       W. R. Hess, Das Prinzip des kleinsten Kraftverbrauches im Dienste hämodynamischer Forschung. Archiv für Anatomie und Physiologie, 1-62 (1914).

22.       C. D. Murray, The Physiological Principle of Minimum Work: I. The Vascular System and the Cost of Blood Volume. Proc Natl Acad Sci U S A 12, 207-214 (1926).

23.       K. Horsfield, G. Dart, D. E. Olson, G. F. Filley, G. Cumming, Models of the human bronchial tree. J Appl Physiol 31, 207-217 (1971).

24.       B. Mauroy, M. Filoche, E. R. Weibel, B. Sapoval, An optimal bronchial tree may be dangerous. Nature 427, 633-636 (2004).

25.       B. Mandelbrot, The fractal geometry of nature. Freeman, Ed.,  (New York, 1983).

26.       T. R. Nelson, B. J. West, A. L. Goldberger, The fractal lung: universal and species-related scaling patterns. Experientia 46, 251-254 (1990).

 

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