Par F. Ji, lauréat d'une bourses étudiante pour le congrès de la Société de Biomécanique 2021.
Jouer aux jeux-vidéo est devenu une activité de plus en plus répandue. Aujourd’hui, cette activité a pris une dimension professionnelle avec le E-Sport et l’émergence de grandes compétitions. Depuis plusieurs années, les développeurs de consoles de jeux-vidéo essayent d’améliorer de plus en plus l’immersion du joueur. L’une des premières améliorations a été, dans les années 1990, le développement de manettes de jeu vibrantes. L’intensité des vibrations ressenties par le joueur est liée à l’intensité de l’action du jeu. Cependant, jusqu’à aujourd’hui, peu d’études se sont intéressées au lien entre la réponse dynamique des manettes et l’apparition de troubles musculosquelettiques chez les joueurs de jeux-vidéo. Bien que ce domaine soit peu étudié, une étude clinique a mis en évidence le lien entre le syndrome vibratoire main-bras (doigts blancs) et l’utilisation intensive de manettes vibrantes chez les jeunes adultes [1]. Nous avons donc mené une étude de cas visant à mesurer l'exposition aux vibrations pour différentes manettes de jeux-vidéos.
Un seul volontaire a utilisé toutes les manettes pendant une partie de jeu d'environ dix minutes. Plusieurs manettes (Nintendo Switch, PlayStation 2, PlayStation 3, Xbox 360 et Xbox One) ont été comparées selon différents critères : (1) le fabricant de la console de jeu vidéo, (2) la génération de la console, (3) le fabricant de la manette et (4) la génération du jeu vidéo. Les vibrations ont été mesurées à l'aide d'un accéléromètre triaxial. Le capteur a été placé de manière à respecter les directives de la norme sur l'exposition humaine aux vibrations transmises par la main [2]. Les données brutes de vibrations ont été traitées à l’aide du logiciel Matlab pour extraire trois indicateurs issus de la norme [2] et de la directive européenne [3] sur l'exposition humaine aux vibrations : 1) la valeur totale de vibration, représentant la dose de vibration transmise au système main-bras ; 2) la valeur d'exposition quotidienne, représentant la valeur d'exposition quotidienne aux vibrations main-bras nécessitant une action préventive ; 3) la valeur limite d'exposition quotidienne représentant la valeur d'exposition quotidienne maximale aux vibrations main-bras.
Pour chacun des quatre cas étudiés, la comparaison des trois indicateurs a été effectuée. Les résultats montrent que les vibrations varient selon les constructeurs de console et de manette et selon les générations. Les vibrations augmentent particulièrement pour les manettes des consoles de chez Microsoft et les temps limites d’exposition aux vibrations sont atteignables par de nombreux profils de joueurs aussi bien professionnels qu’amateurs.
Néanmoins, cette étude de cas présente certaines limites comme le fait qu'un seul volontaire ait participé à l'expérience et que certaines des comparaisons aient été réalisées sur des jeux vidéo différents. Par ailleurs, il convient de noter que certaines manettes de jeu peuvent être utilisées dans différentes configurations de sorte que l'exposition aux vibrations dépend de la façon dont elle est utilisée. En conclusion de cette étude descriptive, il semble qu'aujourd'hui, l'aspect de l'exposition des joueurs à des vibrations potentiellement dangereuses n'est que peu pris en compte dans le développement des consoles et équipements de jeux vidéo et dans la conception des jeux vidéo.
Publication
F. Ji, E. Lacazedieu and T. Provot. Human exposure to vibration, a case of study of video game controllers. Computer Methods in Biomechanics and Biomedical Engineering (2022) Sup. 1, S259-260.
References
[1]: A.G. Cleary, H. McKendrick, J.A. Sills, Hand-arm vibration syndrome may be associated with prolonged use of vibrating computer games, British Medical Journal, 2002, 324(7332), 301
[2]: ISO 5349 : Mechanical vibration - Measurement and evaluation of human exposure to handtransmitted vibration, 2002
[3]: Directive 2002/44/EC of the European parliament and of the Council of 25 June 2002 on the minimum health and safety requirements regarding the exposure of workers to the risks arising from physical agents (vibration).
L’auteur
François Ji , EPF – Graduate School of Engineering, Sceaux, France.
François Ji est étudiant en double cursus à l’EPF Ecole d’Ingénieur-e-s (majeure Ingénierie et Santé) et à la Faculté des Sciences du Sport à l’Université d’Aix-Marseille en Ingénierie et Ergonomie du Mouvement Humain (IEMH).
Copyright
© 2022 par l’auteur. Sauf mention contraire, le contenu du blog de la Société de Biomécanique (texte et figures) est distribué sous licence Creative Commons Attribution - Partage dans les mêmes conditions 4.0.
